La clientèle russe a pratiquement disparu du marché immobilier

La clientèle russe a pratiquement disparu du marché immobilier


Priver les oligarques russes sous sanctions européennes de la propriété de leur bien immobilier.


C’est l’objectif fixé par Bruno Le Maire, ministre de l’Économie. Encore faut-il que la France se dote d’un cadre juridique qui autorise cette saisie confiscatoire. Ce à quoi Bercy et le ministère de la Justice sont en train de s’attacher. «Cela prend du temps car il faut identifier non seulement les biens détenus en propre mais aussi via des sociétés selon des montages complexes», explique-t-on à Bercy où les douanes, l’administration fiscale et le service de renseignements financiers ont été mobilisés.

Et ce n’est pas tout: il faudra sans doute faire évoluer le droit européen qui ne prévoit des saisies avec perte de propriété, uniquement dans le cas de biens mal acquis. «Pour les autres, le gouvernement devra éviter d’aller contre le droit constitutionnel de propriété», met en garde Me Olivier Dorgans, avocat en droit des sanctions économiques internationales au sein du cabinet Ashurst.

Si une partie des Russes ne peuvent plus acquérir de biens et que leurs avoirs sont saisis, le marché immobilier risque-t-il d’être impacté? «Notre clientèle russe a diminué de moitié depuis 2014 (quand les premières sanctions liées à l’annexion de la Crimée ont été établies, NDLR). Avec la crise sanitaire, elle a pratiquement disparu du marché», analyse Alexander Kraft, président de Sotheby’s International Realty France. Depuis la mise en place par Vladimir Poutine d’une obligation de déclarer à l’administration fiscale les transferts d’argent pour acheter une propriété, la clientèle russe se font beaucoup plus rares.

Ces 5 dernières années, les notaires n’ont, par exemple, recensé qu’entre 130 et 140 acquisitions par an en Ile-de-France dont environ 40 à Paris. Soit à peine 1% du total des transactions réalisées par des étrangers (résidents et non résidents). Idem dans le reste de la France: le poids des Russes reste très faible. Entre 280 et 387 acquisitions ont été réalisées par des acheteurs de cette nationalité, selon les notaires de France. Soit à peine plus de 1% du total des transactions faites par des étrangers (résidents et non-résidents).

Le Sud-Est de la France (Saint-Tropez, Cap Ferrat, Cap Martin, Cap d’Antibes), les Alpes (Courchevel) et le Triangle d’or parisien sont très prisés par les propriétaires qui sont restés en France. Le budget des rares acquéreurs? Entre 10 et plus de 100 millions d’euros. Mais les Russes qui auraient des envies d’ailleurs, pourraient faire face à une autre problématique: la difficulté de vendre leur bien immobilier. «Les Russes ont acheté leur propriété, il y a 10/15 ans, à des prix tellement élevés qu’ils n’arrivent à pas trouver preneur aujourd’hui», souligne Me Thierry Delesalle, président de la commission des statistiques de la Chambre des notaires du Grand Paris.

«Traditionnellement, les acheteurs russes ont une préférence pour les adresses hyper prestigieuses et les prestations très haut de gamme, confie Alexander Kraft. Même parmi les acheteurs du Moyen-Orient et américains, les clients potentiellement intéressés sont relativement limités. Et à la montagne, les clients du Moyen-Orient préfèrent louer qu’acheter». Mais, malgré les sanctions qui pèsent sur les propriétaires russes, le président de Sotheby’s ne s’attend pas à des ventes massives. «Je crois qu’ils vont faire profil bas mais ne chercheront pas à vendre leur bien. Toutes les transactions récentes ont répondu aux exigences Tracfin», conclut Alexander Kraft.


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